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Les premières Archives de l’Art français (1851-1862), par Jean Joseph Marquet de Vasselot

Nous transcrivons ici les premières pages de la préface publiée par Jean Joseph MARQUET de VASSELOT (1871-1946) en tête de son Répertoire des publications de la Société de l’Histoire de l’Art français (1851-1927), Paris, Librairie Armand Colin, 1930, p. I-III. 

 

Vers le milieu du XIXe siècle, quelques travailleurs zélés, liés par leur commun amour pour les arts d’autrefois, eurent le grand mérite de comprendre que leur admiration ne serait pas diminuée par une connaissance plus exacte de la biographie des artistes et de l’histoire des monuments.

Comme Philippe de Chennevières l’expliqua, en tête du premier volume de la publication qu’ils entreprirent (Archives de l’Art français, volume 1, 1851-1852), ils avaient l’ambition de « rectifier les erreurs, les fausses dates et les anecdotes controuvées » dans ce qui avait été « écrit… sur ces brillants ou délicats génies qui ont été connus de nos pères », et de « faire pour l’histoire des arts ce qui… avait été accompli vingt-cinq ans plus tôt pour l’histoire politique et archéologique ».

Sans dédaigner « les trouvailles innombrables d’artistes antérieurs à la Renaissance », ils comptaient s’intéresser principalement à « ceux dont nous connaissons et regardons tous les jours les ouvrages avec extase » ;  ils voulaient « mettre à contribution les différents siècles à la fois », sans en exclure le leur et les grands artistes morts qui l’avaient déjà illustré. « Notre œuvre (ajoutait Ph. de Chennevières) a pour premier but d’aider par des notions et des dates nouvelles les études des chercheurs nos contemporains ». Pour la réaliser, ils voulaient retrouver ce qu’ils pourraient des documents des anciennes archives publiques ou privées, si fâcheusement dispersées par la révolution de 1793 ; ils comptaient réunir, non seulement des pièces relatives à la biographie des artistes, mais encore « les marchés conclus entre les artistes et les acquéreurs de leurs œuvres ».

Le petit groupe qui entreprenait bravement un travail si considérable mérite qu’on lui rende pleinement justice, car ses membres ont été véritablement des précurseurs : l’histoire de l’art moderne en France dérive en réalité de leurs travaux.

Parmi eux il convient de citer avant tout :

  • Le marquis Philippe de Chennevières-Pointel (né en 1820, mort en 1899), conservateur du Musée du Luxembourg, puis directeur des Beaux-Arts ;

Louis Noël, Philippe de Chennevières, marbre, Musée d’Orsay @ Brice Leibundgut

  • Anatole de Montaiglon (né en 1824, mort en 1895), professeur à l’École des Chartes, l’un des meilleurs érudits du siècle ;

Étienne Carjat, Anatole de Montaiglon @ Paris Musées

  • Paul Mantz (né en 1822, mort en 1895), critique d’art et connaisseur très averti ;

 

  • Eudore Soulié (né en 1817, mort en 1876), conservateur du Musée de Versailles, dont il publia à partir de 1854 un monumental Catalogue ;

 

  • Louis Dussieux (né en 1815, mort en 1894), professeur à l’École de Saint-Cyr et auteur d’une histoire du château de Versailles.

Edme Adolphe Fontaine, Portrait de Louis Etienne Dussieux, Versailles @ Musée Lambinet

Aidés par tout un groupe de chercheurs, ils entreprirent en 1851 la publication d’un recueil de documents qu’ils intitulèrent : Archives de l’Art français, et dans lequel ils entassèrent pendant onze ans (1851-1862), en huit volumes, tout ce qu’ils jugèrent intéressant dans leurs découvertes sur les arts, du XIVe au XIXe siècle.

En même temps, ils éditèrent l’Abecedario du P. Orlandi (1719), annoté par P.-J. Mariette (6 volumes, 1851-1860), et les Mémoires inédits sur la vie et les ouvrages des membres de l’Académie royale de peinture et de sculpture, depuis sa fondation en 1648 jusqu’à la fin du XVIIIe siècle (2 volumes, 1854).

Ils constituèrent ainsi, en moins de douze ans, le premier noyau de cette masse de documents dont l’accumulation allait devenir, durant toute la fin du XIXe siècle et le début du XXe, le but des recherches passionnées des savants. Ce sont ces pionniers de l’érudition artistique qui ont rendu possibles, non seulement les identifications de beaucoup d’œuvres d’art prises isolément, mais encore les travaux de synthèse que certains travailleurs de la génération suivante ont enfin osé entreprendre.

 

Jean Joseph Marquet de Vasselot

 

 

Références complémentaires :

 

Version intégrale de la préface de Jean Joseph Marquet de Vasselot sur Gallica :

https://gallica.bnf.fr/ark:/12148/bpt6k30461353/f21.item.r=R%C3%A9pertoire

 

Dictionnaire critique des historiens de l’art actifs en France de la Révolution à la Première Guerre mondiale, site internet de l’INHA (voir par exemple Marquet de Vasselot, Dussieux…) :

https://www.inha.fr/fr/ressources/publications/publications-numeriques/dictionnaire-critique-des-historiens-de-l-art.html


OpenEdition vous propose de citer ce billet de la manière suivante :
Brice Leibundgut (1 juin 2023). Les premières Archives de l’Art français (1851-1862), par Jean Joseph Marquet de Vasselot. Société de l’Histoire de l’Art Français (SHAF). Consulté le 10 novembre 2025 à l’adresse https://doi.org/10.58079/u56d


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